Programmes abandonnés, remises gigantesques, promoteurs en redressement : une crise sans précédent dans l’immobilier neuf
Jamais le marché du neuf n’a connu une telle tempête en France. Entre la flambée des taux d’intérêt, l’explosion des coûts de construction, la raréfaction du foncier et l’effondrement des ventes, les promoteurs naviguent en eaux troubles. Résultat ? Projets abandonnés, remises commerciales inédites et faillites en cascade. Et l’horizon 2025 ne s’annonce pas plus clément. Décryptage d’un secteur sous tension.
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Les mises en chantier suivent la même tendance, avec 258 500 logements démarrés sur cette période, en recul de 16,2 % sur un an et de 33 % par rapport à l’avant-crise.
Au troisième trimestre 2024, le marché du neuf poursuit sa contraction : seulement 13 950 logements ont été mis en vente, un repli de 5,7 % par rapport au trimestre précédent. Un frémissement se dessine toutefois du côté des ventes aux particuliers, en hausse de 4,6 % (17 460 réservations). Un rebond relatif, mais encore bien en deçà de la moyenne des cinq dernières années (-38 %).
Dans des villes comme Nantes, Toulouse ou Montpellier, plusieurs promoteurs ont dû renoncer à leurs projets, faute d’acheteurs. Ils ont préféré reporter leur lancement à des jours meilleurs.
Les promoteurs immobiliers n’échappent pas à la crise, plusieurs d’entre eux sont en grande difficulté. Parmi les plus touchés :

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Un marché frappé de plein fouet par une conjoncture défavorable
Les chiffres témoignent d’une situation alarmante. Analyse des causes de cette crise qui secoue les promoteurs :Un effondrement des ventes et des mises en chantier
Les chiffres sont éloquents. Entre décembre 2023 et novembre 2024, 330 900 logements ont été autorisés à la construction, soit une baisse de 11,9 % sur un an et de 28 % par rapport à la période précédant la crise sanitaire, selon le ministère de la Transition écologique.Les mises en chantier suivent la même tendance, avec 258 500 logements démarrés sur cette période, en recul de 16,2 % sur un an et de 33 % par rapport à l’avant-crise.
Au troisième trimestre 2024, le marché du neuf poursuit sa contraction : seulement 13 950 logements ont été mis en vente, un repli de 5,7 % par rapport au trimestre précédent. Un frémissement se dessine toutefois du côté des ventes aux particuliers, en hausse de 4,6 % (17 460 réservations). Un rebond relatif, mais encore bien en deçà de la moyenne des cinq dernières années (-38 %).
Les causes de cette crise multidimensionnelle
Les promoteurs subissent une double peine :- Une offre sous pression : la raréfaction des terrains, la flambée des coûts des matériaux et de l’énergie (+25 % en deux ans) ainsi que des normes environnementales toujours plus exigeantes rendent les projets plus coûteux et difficiles à rentabiliser.
- Une demande en berne : la remontée fulgurante des taux d’intérêt, passés de 0,8 % à 4,5 % en deux ans, a fortement réduit la capacité d’achat des ménages. Résultat : moins d’acheteurs, des programmes qui peinent à se vendre.
Des programmes à l’arrêt, des remises spectaculaires
Faute d’acheteurs, certains projets sont gelés tandis que d’autres cassent les prix pour écouler leurs stocks.Des projets bloqués, faute de pré-commercialisation
Dans la promotion immobilière, les banques exigent généralement 40 à 50 % de pré-commercialisation avant de débloquer les financements. Avec l’effondrement des ventes, de nombreux programmes sont abandonnés avant même de sortir de terre.Dans des villes comme Nantes, Toulouse ou Montpellier, plusieurs promoteurs ont dû renoncer à leurs projets, faute d’acheteurs. Ils ont préféré reporter leur lancement à des jours meilleurs.
Des rabais records pour écouler les stocks
Face à cette impasse, les promoteurs multiplient les offres exceptionnelles :- Jusqu’à 89 000 € de réduction sur certains programmes.
- Frais de notaire offerts et baisses de 10 à 15 % sur le prix d’achat.
- Offres inédites : bons d’achat pour l’aménagement, garanties prolongées et même des tirages au sort permettant de gagner un appartement.
Une vague de faillites sans précédent chez les promoteurs
Entre liquidations et plans de sauvegarde, les faillites s’enchaînent. Elles frappent même des grands noms du marché.Une explosion des défaillances dans le secteur
Selon le cabinet Altares, 67 000 entreprises en France ont fait l’objet d’une procédure collective en 2024. Parmi elles, le secteur de la construction figure parmi les plus touchés, avec une forte hausse des liquidations et redressements judiciaires.Les promoteurs immobiliers n’échappent pas à la crise, plusieurs d’entre eux sont en grande difficulté. Parmi les plus touchés :
- AST Groupe, 3ᵉ constructeur de maisons individuelles en France, placé en redressement judiciaire en août 2024.
- NG Promotion, en difficulté après une expansion rapide et en quête de nouveaux investisseurs.
- AFC Promotion, fondé par Alexandra François-Cuxac, ex-présidente de la Fédération des Promoteurs Immobiliers (FPI), en grande difficulté financière.
- Carrère Promotion, placé sous sauvegarde judiciaire et en attente d’un repreneur.
Des conséquences en cascade sur l’emploi
La crise frappe aussi les plus grands. Nexity, premier promoteur immobilier français, a annoncé 275 licenciements en 2024, après une première vague de suppressions de postes en début d’année. L’ensemble du secteur du bâtiment est sous tension, ce qui met en péril des milliers d’emplois, des entreprises de construction aux agences immobilières.Quelles perspectives pour l’avenir ?
Le secteur cherche des solutions pour sortir de l’ornière. La reprise reste pour l’instant incertaine.Des mesures gouvernementales encore timides
Face à l’urgence, des discussions ont été engagées avec le gouvernement pour tenter d’atténuer la crise. Parmi les pistes envisagées :- Un assouplissement des conditions d’octroi de crédit immobilier pour relancer la demande.
- Un nouveau dispositif fiscal pour remplacer le Pinel, dont la fin était programmée en décembre 2024.
- Une simplification des règles d’urbanisme pour accélérer l’obtention des permis de construire.
Une nécessaire adaptation du modèle économique des promoteurs
Face aux nouvelles contraintes, certains promoteurs cherchent à réinventer leur stratégie :- Miser sur le logement social, en vendant en bloc à des bailleurs sociaux pour sécuriser leurs débouchés.
- Repenser leurs programmes, en intégrant davantage de logements intermédiaires à loyers encadrés pour répondre aux besoins du marché.
- Optimiser les coûts de construction, avec des solutions innovantes comme la construction modulaire.